La technologie des véhicules autonomes : état des lieux
Il est évident que la commercialisation des véhicules autonomes est à nos portes. Pendant le sommet, il a été question du fait que cet avènement amènera un changement des mentalités concernant la propriété et l’utilisation de véhicules ainsi que le transport en général.
Dans leurs présentations, les constructeurs automobiles ont expliqué que, du point de vue de la technologie, les véhicules autonomes (niveau 4 des niveaux d’automatisation des véhicules de SAE International) pourraient être utilisés par le public d’ici 5 ans. Un constructeur a même avancé qu’il espérait commercialiser des véhicules de niveau 4 d’ici 2021. Ces véhicules sont actuellement mis à l’essai dans plusieurs territoires aux États-Unis, en Europe et au Canada. La Californie a par ailleurs récemment adopté une loi permettant la mise à l’essai de véhicules autonomes de niveau 5, pourvu notamment qu’ils soient dotés d’un lien de communication directe avec un opérateur à distance.
On a en outre laissé entendre que les constructeurs pourraient voir leur rôle traditionnel se transformer : de fabricants, ils deviendraient des « fournisseurs de mobilité », en raison du coût élevé des premières générations de véhicules autonomes, de l’urbanisation de la population et de la popularité grandissante du covoiturage au détriment de la propriété de véhicules. De nombreux constructeurs ont déjà un pied dans l’industrie du covoiturage, et l’autonomisation des véhicules pourrait représenter une occasion de croissance dans ce secteur.
Établissement d’un régime réglementaire adéquat pour les véhicules autonomes
L’arrivée imminente des véhicules autonomes risque de bouleverser le régime d’assurance et de réglementation au Canada, qui est fondé sur une utilisation unique (personnelle ou commerciale) par un titulaire, dans lequel les primes d’assurance sont déterminées principalement en fonction des antécédents du conducteur et où la responsabilité repose sur son comportement.
Pendant le sommet, l’approche privilégiant une police unique a été évoquée comme possibilité pour assurer les véhicules autonomes au Canada. D’ailleurs, le Royaume-Uni a récemment adopté la Automated and Electric Vehicles Act, en vertu de laquelle une seule police d’assurance s’appliquerait en cas d’accident, peu importe si le véhicule est en mode autonome ou non. L’assureur serait responsable des dommages subis par la personne lésée, mais posséderait un droit de subrogation à l’encontre de toute autre partie, y compris le fabricant du véhicule autonome (voir notre numéro de juillet pour une analyse de cette loi).
L’approche de la police unique a obtenu la faveur des conférenciers, qui y voient un moyen de s’assurer que les parties lésées seront indemnisées rapidement tout en évitant des actions en justice coûteuses et complexes en responsabilité du fait du produit contre les constructeurs de véhicules autonomes. Si les tendances prévues concernant la propriété et l’utilisation de véhicules se concrétisent, il faudra peut-être revoir la pertinence de cette approche. Pour la première vague de véhicules autonomes, toutefois, elle semble être une option viable.
Si l’approche est adoptée au Canada, certaines questions resteront à régler; il conviendra notamment de déterminer si les assureurs traditionnels ou les constructeurs agiront à titre d’assureurs des véhicules autonomes. Bien que les assureurs traditionnels semblent les mieux placés, vu qu’ils sont déjà soumis à la réglementation et à la surveillance de pouvoirs publics et qu’ils savent comment traiter, ajuster et régler des réclamations, la question du partage des données et des renseignements vient compliquer les choses. Il faudra aussi décider si l’on veut que les fabricants de véhicules autonomes participent au traitement et au règlement des réclamations.
Les assureurs conventionnels devront également composer avec la question de l’établissement des taux. Il s’agira là d’une tâche ardue, puisque les véhicules autonomes seront utilisés à des fins diverses, en covoiturage et en propriété commune, et qu’ils n’auront que très peu de données sur lesquelles fonder l’évaluation du risque de collision. En outre, le coût de réparation de ces véhicules demeure largement inconnu.
Le sommet a globalement permis de mettre en lumière les possibilités et les défis liés à l’arrivée prochaine des véhicules autonomes sur les routes canadiennes. Les conférenciers ont été clairs : pour que le déploiement de ces véhicules se déroule sans heurt, les organismes de réglementation, les constructeurs, les assureurs, les experts du droit et les autres intervenants devront établir ensemble un régime de réglementation pratique, simple et juste.