Les secrets commerciaux figurent parmi les actifs essentiels et précieux de nombreuses entreprises, mais ils sont souvent sous-exploités. Ils jouent en outre un rôle crucial dans toute stratégie de propriété intellectuelle (PI) et s’emploient fréquemment comme moyen de protection.
Qui plus est, leur préservation est souvent gage d’une valeur considérable. Pensons seulement à la recette du Coca-ColaMD, à l’algorithme de classification des résultats de recherche de GoogleMD ou à la formule du WD-40MD.
Petites ou grandes, des entreprises de toutes tailles détiennent des secrets commerciaux et en font usage quotidiennement. Ainsi, la notion de secret commercial englobe les modes de prestation de services, les renseignements sur des relations clés (dont les données de consommateurs), le code source, les recettes, les modèles tarifaires exclusifs, les algorithmes, les pratiques commerciales, les fonctionnalités clés de produits et les processus de fabrication.
Parmi les secteurs où se créent et s’utilisent des secrets commerciaux, on compte ceux des technologies de l’information, des soins de santé et des produits de consommation. On les voit également dans des domaines technologiques émergents, comme les technologies vertes, agricoles et médicales et l’intelligence artificielle.
L’entreprise qui entend qualifier un renseignement confidentiel de secret commercial doit prendre certaines mesures pour le protéger de ses concurrents.
Chaque forme de PI (brevet, marque de commerce, droit d’auteur, dessin industriel) protège différents droits et est assortie de limites. Le secret commercial n’échappe pas à la règle : si son maintien présente des avantages qui lui sont exclusifs, il est assujetti à des restrictions spécifiques.
1. Avantage : L’obtention et le maintien d’un secret commercial peuvent être relativement abordables. Le secret commercial est la solution pour qui souhaite protéger sa PI aisément et de façon rentable. Contrairement à d’autres formes de PI (comme le brevet), l’enregistrement d’un secret commercial est gratuit, n’entraîne aucune exigence particulière et ne requiert pas l’aval du gouvernement.
Les entreprises titulaires de secrets commerciaux particulièrement précieux se dotent de programmes de protection robustes dont la conception et la mise en œuvre nécessitent toutefois un certain investissement.
2. Avantage : Impérissables, les secrets commerciaux se commercialisent à long terme. Contrairement au brevetage d’une invention, l’enregistrement d’un secret commercial ne suppose aucune publication.
En effet, pour obtenir un brevet au Canada, le demandeur doit communiquer les détails de l’invention, y compris son procédé de fabrication ou son mode d’utilisation, en détail suffisant pour en permettre la reproduction. Une demande de brevet sera généralement rendue publique quelque 18 mois après son dépôt, ce qui signifie que la concurrence pourra se renseigner sur l’invention et la comprendre. Cela ne pose pas de problème si le brevet est accordé, car il deviendra de ce fait possible de protéger l’invention, mais s’il ne l’est pas, la concurrence sera libre d’utiliser la technologie présentée. Des concurrents pourraient également recréer l’invention une fois le brevet échu, soit généralement après une vingtaine d’années. À l’inverse, le secret commercial reste hors de portée des compétiteurs aussi longtemps qu’il est préservé.
Pour ce qui est du droit d’auteur, sa protection ne ratisse pas aussi large que celle du secret commercial ou du brevet. En effet, il sert à protéger les œuvres littéraires, musicales, dramatiques ou artistiques. Il est en outre lui aussi limité dans le temps : son expiration survient 50 ans après le décès de l’auteur.
Ces dates d’expiration viennent restreindre l’exclusivité dont jouit une entreprise sur le marché quant à des travaux et inventions qui, pourtant, pourraient être protégés à plus long terme. En fait, même si les entreprises connaissent souvent une évolution rapide, certains secrets commerciaux ont eu une durée de vie qui a de loin dépassé celle d’un brevet ou d’un droit d’auteur.
3. Avantage : Le secret commercial peut protéger des renseignements qui sont hors de portée des autres formes de PI. Le secret commercial n’est pas soumis aux mêmes exigences que les autres formes de propriété intellectuelle. Pour être brevetable, une invention doit être nouvelle, non évidente et utile. La marque de commerce doit être distinctive, et l’œuvre qu’on entend protéger par droit d’auteur doit être originale. Mais il n’en est rien pour le secret commercial.
Si garder secrète une invention, une idée ou une pratique commerciale lui donne de la valeur et que des mesures sont prises en ce sens, il devient possible de la qualifier de secret commercial, du moins en partie, même si aucune autre forme de propriété intellectuelle ne peut la protéger. Par exemple, certains jeux de données et simples faits valent leur pesant d’or, mais nulle autre forme de PI ne peut assurer leur protection.
4. Inconvénient : Pour avoir quelque valeur, le secret commercial doit rester secret. S’il est divulgué, un secret commercial n’a plus de valeur.
Plus le nombre de personnes ayant accès au secret commercial est élevé, plus le risque de divulgation est grand. Il peut en effet être difficile de maintenir un secret commercial auquel de nombreuses personnes ont accès.
Ainsi, il fonctionne à son meilleur dans les cas où la PI concernée est difficile à recréer par ingénierie inverse ou de façon indépendante, et s’il peut être morcelé de sorte que personne n’en connaisse l’intégralité.
5. Inconvénient : Un secret commercial se conçoit de façon indépendante. La menace qu’une tierce partie conçoive ou découvre par elle-même l’objet d’un secret commercial plane constamment sur le titulaire du secret. Si une autre personne peut concevoir le secret ou obtenir l’information qui le sous-tend, elle aura le droit de l’utiliser (voire de le breveter) dans la mesure où, ce faisant, elle ne contrevient pas à un contrat ou ne s’approprie pas indûment le secret de la partie qui l’a mis au point avant elle.