Points à retenir
- Une taxe de 3 % s’applique désormais aux revenus canadiens tirés de certains services numériques.
- À partir de 2025, certains contribuables auront de nouvelles obligations d’inscription, de déclaration et de paiement concernant les revenus canadiens perçus à compter du 1er janvier 2022.
- Les entreprises visées doivent connaître leurs obligations d’inscription et de déclaration indépendamment de la taxe.
- La Loi sur la taxe sur les services numériques (LTSN) pourrait être remise en question à l’échelle nationale et internationale, ce qui pourrait avoir une incidence sur les modalités de son application.
- Cette nouvelle taxe pourrait entraîner une hausse des prix pour les consommateurs.
Entrée en vigueur de la LTSN
Le gouvernement canadien perçoit désormais une taxe sur les revenus canadiens tirés de services numériques (TSN), avec effet rétroactif. À partir de 2025, certains contribuables devront déclarer les revenus visés perçus à compter du 1er janvier 2022 et payer les taxes applicables.
La LTSN concrétise l’intention précédemment exprimée par le gouvernement canadien de mettre en place une TSN en l’absence d’un échéancier multilatéral clair et contraignant pour la mise en œuvre du premier pilier (sur deux) du plan du Cadre inclusif de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et du G20 visant une réforme fiscale internationale.
Le projet de loi C-59, y compris la LTSN et les règlements connexes, a reçu la sanction royale le 20 juin 2024 et est entré en vigueur le 28 juin 2024, conformément à un décret qui n’a été publié que le 3 juillet 2024.
Les contribuables étrangers et nationaux ciblés sont ceux dont le revenu total consolidé annuel atteint ou dépasse 750 000 000 € et dont le revenu annuel canadien de services numérique dépasse 20 000 000 $. Les contribuables qui atteignent ou dépassent ces deux seuils devront payer une taxe de 3 % sur le revenu canadien de services numériques perçu depuis le 1er janvier 2022.
En plus d’une nouvelle taxe, la LTSN impose une obligation d’inscription et de déclaration aux contribuables qui atteignent les seuils mentionnés, ainsi qu’aux entreprises dont le revenu total atteint 750 000 000 € et dont le revenu annuel canadien visé dépasse 10 000 000 $. Les contribuables concernés doivent s’inscrire d’ici le 31 janvier 2025 et présenter une déclaration annuelle de TSN avant le 30 juin de chaque année.
Contexte international de la TSN
Même s’il affirme continuer à soutenir les discussions de l’OCDE sur la réforme fiscale internationale, le Canada a décidé de ne pas attendre un accord multilatéral et a adopté une taxe unilatérale et rétroactive sur les services numériques, suivant ainsi l’exemple de pays comme l’Autriche, la France, l’Inde et le Royaume-Uni.
Avant la promulgation de la LTSN, l’opposition au projet de loi provenait principalement des entreprises et des groupes sectoriels visés, en particulier aux États-Unis. Depuis l’annonce de l’entrée en vigueur de la Loi, juste avant la longue fin de semaine de la fête de l’Indépendance aux États-Unis, le gouvernement américain se fait presser de donner une réponse officielle, laquelle pourrait inclure des mesures de rétorsion et se répercuter au-delà du secteur des services numériques. Quelle que soit cette réponse, il est probable que les contribuables ciblés refileront la facture aux consommateurs canadiens, qui verront sans doute augmenter les frais des services de diffusion en continu, des plateformes de vente et de revente, de livraison de nourriture et d’autres services numériques de plus en plus présents dans la vie quotidienne.
L’annonce de la LTSN a également fait réagir les chambres de commerce canadienne et américaine, lesquelles exigent la reconsidération de la TSN et le retour du Canada à la table des négociations multilatérales, soulignant les pressions inflationnistes que la TSN pourrait exercer sur les consommateurs ainsi que les préjudices potentiels à l’innovation canadienne et aux relations du pays avec ses partenaires commerciaux internationaux.
Au-delà des réactions internationales à l’adoption de la TSN, des contestations judiciaires pourraient voir le jour au Canada, en raison notamment de l’étendue des pouvoirs d’application et d’exécution conférés par la LTSN. Comme discuté dans l’Énoncé concernant la Charte du ministère de la Justice au sujet du projet de loi C-59, la LTSN confère des pouvoirs étendus qui pourraient toucher les articles 7, 8, 11 et 12 de la Charte canadienne des droits et libertés, et bien qu’il y ait des similitudes avec les pouvoirs acceptés en vertu d’autres lois fiscales canadiennes, nous constatons que l’érosion générale de la Charte des droits du contribuable, abordée dans un précédent article, n’a pas encore donné lieu à de réelles contestations de la part des contribuables. De plus, les mesures prévues dans la LTSN relativement à la collecte, à la divulgation et à l’utilisation des données confidentielles, y compris des concepts tels qu’un « renseignement ou registre étranger »1, présentent un risque d’utilisation abusive et doivent probablement être appliquées avec retenue afin d’éviter d’éventuels litiges.
Étant donné le contexte global de la TSN et le fait que des éléments importants de cette dernière étayent les règlements sous-jacents de la LTSN, on pourrait voir changer la mise en application de la TSN sans devoir recourir à une nouvelle intervention législative.
Conclusion
Les grandes entreprises doivent se familiariser avec leurs nouvelles obligations potentielles relativement à la TSN et avec les choix qui s’offrent à elles en ce qui a trait aux déclarations et aux revenus imposés.
Pour en savoir plus sur la TSN et sur ses effets potentiels sur votre entreprise, n’hésitez pas à communiquer avec les personnes qui ont participé à la rédaction du présent article, ou avec le groupe Droit fiscal de BLG.