Le 18 décembre 2020, le ministre des Ressources naturelles du Canada a publié le Plan d’action canadien pour les petits réacteurs modulaires (le « Plan d’action »), réponse attendue depuis longtemps aux 53 recommandations de la Feuille de route pour les petits réacteurs modulaires publiée en novembre 2018.
Tout comme la Feuille de route pour les petits réacteurs modulaires (PRM), le Plan d’action est le fruit des consultations menées par le gouvernement fédéral auprès d’une centaine d’organisations en vue de proposer une économie politique harmonisée mettant notamment à contribution gouvernement fédéral, organismes de réglementation fédéraux, sociétés d’État, provinces, territoires et communautés autochtones, services publics, universités et syndicats de travailleurs.
Le Plan d’action reconnaît que les PRM peuvent potentiellement fournir une source d’électricité assortie d’émissions de carbone faibles ou nulles et renferme une déclaration de principes ainsi qu’un appel à l’action invitant tous les partenaires à appuyer la déclaration et à faire état de leurs mesures actuelles et de leurs plans futurs en réponse aux recommandations, notamment :
- Soutenir l’innovation et le développement des technologies des PRM;
- Élaborer des politiques et des normes pour appuyer le déploiement des PRM;
- Aider le Canada à respecter ses engagements en matière de lutte contre les changements climatiques et d’énergies propres;
- Explorer les possibilités de partenariats avec les communautés autochtones en vue de favoriser le développement régional.
La Commission canadienne de sûreté nucléaire (la CCSN), organisme de réglementation nucléaire du Canada, est l’une des principales parties prenantes du Plan d’action. La CCSN est notamment chargée de réglementer le développement, la production et l’utilisation de l’énergie nucléaire ainsi que la production, la possession et l’utilisation de substances nucléaires dans le but d’éviter les risques déraisonnables pour l’environnement, la santé et la sécurité des citoyens et la sécurité nationale.
Modifications apportées aux règlements, politiques et lois qui régissent les PRM
A. Sécurité nucléaire
La CCSN a entamé en 2018 la révision de sa réglementation en matière de sécurité nucléaire dans le but de remanier le cadre réglementaire existant pour l’axer davantage sur le rendement et moins sur des exigences prescriptives, tout en respectant les principes de la sécurité nucléaire. Le concept de ce processus s’apparente au remaniement de leur réglementation auquel procèdent actuellement d’autres organismes de réglementation de l’énergie, dont la Régie de l’énergie du Canada et l’Office de l’énergie de l’Ontario. Le Plan d’action rappelle les résultats escomptés suivants, énumérés dans la Feuille de route pour les PRM de 2018 :
- Le Règlement sur la sécurité nucléaire révisé ne couvre que des principes généraux, de façon comparable aux autres règlements, et les exigences prescriptives sont supprimées.
- Le nouveau REGDOC (document de réglementation) produit par la CCSN fournit les détails nécessaires, y compris le concept d’une approche échelonnée.
B. Efficacité réglementaire
La CCSN est en train de réviser son cadre de réglementation actuel pour s’assurer qu’il demeure neutre sur le plan technologique pour ce qui est du processus d’autorisation et qu’il applique des critères de rendement axés sur des objectifs visant à faciliter la prise de décisions. La CCSN continuera de se concentrer sur l’évaluation de la sûreté des nouvelles technologies, y compris les PRM.
De plus, la CCSN met à profit ses collaborations internationales (voir ci-après) pour élaborer une méthodologie systématique visant à appliquer une approche graduelle en ce qui concerne les fonctions réglementaires telles que l’autorisation et la vérification de la conformité.
La CCSN prend également des mesures pour bâtir son capital humain et sa base de connaissances relativement à l’examen et à l’approbation des demandes de licences. Le Plan d’action rappelle les résultats escomptés suivants, énumérés dans la Feuille de route pour les PRM de 2018 :
- Débloquer des gains d’efficacité afin d’offrir plus de souplesse et de clarté dans les processus d’autorisation et de réglementation des PRM.
- Veiller à ce que le personnel assure une surveillance réglementaire efficace, prévisible et exhaustive.
C. Mobilisation des citoyens et des Autochtones à l’égard des PRM.
La CCSN continuera à mobiliser les Autochtones et le grand public à l’égard de sa méthode d’évaluation et de réglementation des RPM, notamment en renforçant le rôle qu’elle joue dans le processus d’autorisation pour ce qui touche la conception, la construction, l’exploitation et le déclassement des PRM. Elle organisera une consultation publique sous forme de webinaire sur son approche réglementaire des PRM au printemps 2021.
Le Plan d’action rappelle les résultats escomptés suivants, énumérés dans la Feuille de route pour les PRM de 2018 :
- Promouvoir la communication au public et aux communautés autochtones de renseignements concernant le cadre réglementaire sur les PRM, notamment en ce qui a trait aux licences et à la gestion des déchets;
- Continuer à mobiliser les groupes autochtones et le public, dans la mesure du possible.
D. Collaboration internationale
À l’échelle internationale, la CCSN participe à des efforts de collaboration visant à assurer la préparation à la réglementation des technologies nucléaires innovantes, comme les PRM. Ces efforts visent à générer des gains d’efficacité lors des examens réglementaires et du partage de l’information et à éviter le double emploi en tirant parti des évaluations techniques effectuées par d’autres organismes de réglementation.
L’objectif final est de mettre au point des approches harmonisées en matière d’autorisation pour les technologies de réacteurs avancés, y compris les PRM. En 2019, la CCSN a signé avec la Nuclear Regulatory Commission des États-Unis un protocole de coopération qui pourrait rendre plus efficace l’examen des PRM. La CCSN a également signé un protocole de coopération semblable avec l’Office for Nuclear Regulation du Royaume-Uni, qui resserre leur collaboration actuelle au moyen d’échanges techniques et de partage de programmes de formation et d’activités de perfectionnement.
La CCSN travaille également en étroite collaboration avec l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) et l’Agence pour l’énergie nucléaire (AEN). Elle préside notamment la Commission des normes de sûreté de l’AIEA, organe permanent composé de hauts fonctionnaires chargés d’établir à l’échelle nationale des normes et d’autres documents réglementaires en matière de sûreté nucléaire, de protection radiologique, de transport et de gestion des déchets et de voir à la préparation et aux mesures d’intervention en cas d’urgence. La CCSN participe également activement à plusieurs groupes de travail sous la direction de l’AEN.
Enfin, la CCSN donne un aperçu de la réglementation aux pays qui se lancent dans l’utilisation des technologies nucléaires et qui envisagent d’élaborer des cadres réglementaires. La CCSN a fourni des conseils et dispensé des formations à ces pays sur les questions de sûreté et d’autorisation en matière de PRM.
Le Plan d’action rappelle les résultats escomptés suivants, énumérés dans la Feuille de route pour les PRM de 2018 :
- Le Canada est bien placé pour influencer et diriger le développement de cadres internationaux habilitants pour le déploiement global des PRM.
- Des protocoles de coopération avec d’autres organismes de réglementation nucléaire sont élaborés pour favoriser des examens plus efficaces et l’harmonisation des approches en matière d’autorisation des PRM, notamment des exigences réglementaires.
Conclusion
Le Plan d’action précise que la CCSN considère que ses mesures sont « en voie de réalisation ».
Bien qu’aucun délai ne soit précisé dans le Plan d’action, la CCSN a publié un Plan du cadre de réglementation 2017-2022 plus détaillé qui présente un plan de travail complet indiquant les règlements et les documents d’application de la réglementation que la CCSN envisage d’élaborer ou de modifier, avec des objectifs précis pour les décisions associées à chacun des éléments du plan de travail.
Les sujets abordés dans la réponse publiée par la CCSN au sujet des PRM ne surprendront pas les autres professionnels de la réglementation de l’énergie. La plupart des organismes de réglementation de l’énergie, y compris la Régie de l’énergie du Canada et l’Office de l’énergie de l’Ontario, s’affairent à moderniser leur cadre réglementaire afin :
- d’adopter une approche de la réglementation fondée sur le rendement moins axée sur les exigences prescriptives;
- d’adapter le processus réglementaire pour assurer une meilleure participation du public et des principales parties prenantes;
- d’adapter le cadre réglementaire pour accroître l’efficacité de la réglementation;
- d’adapter le cadre réglementaire pour mieux répondre aux nouvelles technologies innovantes tout en restant neutre sur le plan technologique (et pour éviter le favoritisme).
Alors que les régies de l’électricité mobilisent leur communauté pour s’adapter de façon plus générale aux ressources énergétiques décentralisées (RED), la CCSN est spécifiquement chargée de la question des PRM.
Il est possible de tirer des enseignements, non seulement en examinant les mesures prises par d’autres organismes de réglementation de la sûreté nucléaire dans le monde, mais aussi en étudiant ce que font d’autres organismes de réglementation innovants au niveau national et en s’inspirant de leurs pratiques optimales.