Les employeurs sous réglementation fédérale doivent prendre note que des changements importants au Code canadien du travail (le « Code ») ont été sanctionnés et ont pris effet le 1er septembre 2019. Ces changements s’inscrivent dans le cadre d’une vaste réforme visant à moderniser le Code, devenu désuet, au moyen d’une série de projets de loi d’exécution du budget (notamment les projets de loi C-63 et C-86). Certains des changements proposés ont été soulignés dans notre article Projet de loi C-86 : Le gouvernement fédéral propose des changements significatifs aux normes prévues au Code canadien du travail. Ils sont désormais en vigueur et portent sur ce qui suit.
Horaire de travail
L’employeur doit fournir à l’employé son horaire de travail par écrit au moins 96 heures avant le début de sa première période de travail ou de son premier quart de travail prévu à l’horaire, à défaut de quoi l’employé peut refuser de travailler la période ou le quart de travail prévu. Une exception s’applique lorsque la modification de l’horaire de travail vise à parer à une situation que l’employeur ne pouvait raisonnablement prévoir ou une situation qui présente une menace imminente ou sérieuse pour la vie, la santé ou la sécurité de toute personne, une menace de dommages à des biens ou de perte de biens ou une menace d’atteinte grave au fonctionnement normal de l’établissement de l’employeur. Si l’employeur modifie une période ou un quart de travail au cours duquel l’employé est tenu de travailler ou si l’employeur ajoute une autre période ou un autre quart de travail à l’horaire de l’employé, il doit donner un préavis d’au moins 24 heures.
Pauses
L’employé a droit, durant chaque période de cinq heures de travail consécutives, à une pause non rémunérée de 30 minutes. Dans le cas où l’employé est tenu de rester à la disposition de l’employeur pendant sa pause, celle-ci est rémunérée. L’employeur peut reporter ou annuler la pause de l’employé pour parer à une situation qu’il ne pouvait raisonnablement prévoir ou une situation qui présente une menace imminente ou sérieuse pour la vie, la santé ou la sécurité de toute personne, une menace de dommages à des biens ou de perte de biens ou une menace d’atteinte grave au fonctionnement normal de l’établissement de l’employeur. L’employé a aussi droit à une période de repos d’au moins huit heures consécutives entre chaque quart ou période de travail. Le Code ne contenait jusqu’à présent aucune disposition sur les pauses, mais les nouvelles dispositions sont conformes à de nombreuses normes d’emploi provinciales.
Pauses pour raisons médicales ou allaitement
Les employés peuvent maintenant prendre des pauses non rémunérées pour des raisons médicales, pour allaiter ou pour extraire du lait. Les nouvelles dispositions ne précisent pas de fréquence ou de durée maximale pour ces pauses, mais elles autorisent l’employeur à demander un certificat, délivré par un professionnel de la santé, précisant la durée et la fréquence des pauses qui sont nécessaires pour des raisons médicales.
Heures supplémentaires : majoration de salaire ou congé compensatoire
Le Code prévoit maintenant expressément que les employés ont droit, pour les heures supplémentaires qu’ils effectuent, à une majoration de leur taux régulier de salaire d’au moins cinquante pour cent ou à un congé compensatoire payé (à raison d’une heure et demie pour chaque heure supplémentaire travaillée), sous réserve de certaines conditions. Le congé compensatoire doit être pris dans les trois mois qui suivent l’expiration de la période de paie au cours de laquelle les heures supplémentaires ont été effectuées (mais cette période peut être plus longue dans le cas où l’employé est visé par une convention collective ou si elle peut être portée à douze mois en vertu d’un accord conclu avec l’employeur). Si le congé compensatoire n’est pas pris dans le délai applicable ou en cas de cessation d’emploi, l’employeur doit le payer dans les trente jours qui suivent. L’employé peut refuser d’effectuer les heures supplémentaires que lui demande son employeur pour s’acquitter de responsabilités visées par le nouveau congé pour obligations familiales.
Assouplissement des conditions d’emploi
L’employé qui travaille pour un employeur sans interruption depuis au moins six mois peut demander à celui-ci des changements au nombre d’heures qu’il doit travailler, à son horaire ou à son lieu de travail, ainsi qu’à toute autre condition d’emploi qui lui est applicable et est prévue par règlement. La demande doit être faite par écrit et comporter certains renseignements. À la réception d’une telle demande, l’employeur doit faire droit à la demande, intégralement ou partiellement, ou la rejeter. En cas de refus, l’employeur doit donner à l’employé un avis écrit de sa décision, où il énonce les motifs pour lesquels il n’a pas consenti à tout ou partie des changements demandés. La loi interdit les représailles contre un employé qui a fait une demande d’assouplissement de ses conditions d’emploi.
Congés annuels
Le droit aux congés annuels est bonifié comme suit :
- deux semaines pour les employés justifiant d’une année de service (indemnité d’au moins quatre pour cent du salaire);
- trois semaines pour les employés justifiant de cinq années consécutives de service (indemnité d’au moins six pour cent du salaire);
- quatre semaines pour les employés justifiant de dix années consécutives de service (indemnité d’au moins huit pour cent du salaire).
Le Code prévoit que les congés annuels peuvent être pris en une seule période ou, à la demande de l’employé et avec l’approbation de l’employeur (dans les deux cas par écrit), plus d’une période. Les congés annuels peuvent par ailleurs être interrompus pour certains congés.
Congé de décès
Le congé de décès est passé à cinq jours (au lieu de trois) et peut être pris pendant la période qui commence à la date du décès et se termine six semaines après la date des funérailles du proche parent, de son inhumation ou du service commémoratif tenu à son égard, selon la date qui est la plus éloignée. Pour les employés comptant trois mois consécutifs d’emploi continu, les trois premiers jours de congé doivent être payés (les deux autres jours étant non rémunérés).
Nouveaux congés
Le Code inclut désormais les nouveaux congés suivants :
- Congé personnel. L’employé a droit à un congé personnel de cinq jours par année civile pour soigner sa maladie ou blessure, s’acquitter d’obligations relatives à la santé de tout membre de sa famille ou aux soins à lui fournir, s’acquitter d’obligations relatives à l’éducation de tout membre de sa famille qui est âgé de moins de dix-huit ans, gérer toute situation urgente le concernant ou concernant un membre de sa famille ou assister à sa cérémonie de citoyenneté. Les employés justifiant de trois mois de service ont droit à la rémunération des trois premières journées de congé personnel.
- Congé pour les victimes de violence familiale. L’employé qui est victime de violence familiale ou le parent d’un enfant qui en est victime a droit, pour chaque année civile, à un congé d’au plus dix jours, à prendre en une ou plusieurs périodes d’au moins une journée. Le congé doit permettre à l’employé ou à l’enfant de recevoir des soins médicaux, d’obtenir des services ou des conseils, de recevoir de l’aide sur le plan juridique ou de la part d’organismes chargés de l’application de la loi ou encore de déménager. Les employés justifiant de trois mois de service ont le droit d’être rémunérés pendant les cinq premières journées du congé pour les victimes de violence familiale.
- Congé pour pratiques autochtones traditionnelles. L’employé qui est un Autochtone (défini comme étant un Indien, un Inuit ou un Métis) et qui travaille pour un employeur sans interruption depuis au moins trois mois a droit, pour chaque année civile, à un congé d’au plus cinq jours pour lui permettre de se livrer à une pratique autochtone traditionnelle, notamment la chasse, la pêche et la récolte ou la cueillette.
Chacun de ces congés peut être pris en une ou plusieurs périodes d’au moins une journée. L’employeur peut demander à l’employé de fournir des documents à l’appui des motifs du congé dans les 15 jours suivant le retour au travail de l’employé après son congé.
Congé pour raisons médicales
Le congé pour raisons médicales remplace le congé de maladie en vertu du Code. Les employés ont toujours droit à un congé non rémunéré d’au plus 17 semaines, lequel peut maintenant être pris en raison a) d’une maladie ou d’une blessure, b) d’un don d’organe ou de tissu, ou c) d’un rendez-vous médical durant les heures de travail. L’employé doit donner à l’employeur un préavis écrit de quatre semaines précisant la date de début et la durée du congé, à moins qu’il existe une raison valable pour qu’un tel avis ne puisse être donné, auquel cas le préavis doit être communiqué le plus rapidement possible.
Congé pour fonctions judiciaires
Les employés ont droit à un congé pour agir à titre de témoin de la cour ou de juré ou pour participer à un processus de sélection de jurés. La durée du congé n’est pas limitée par le Code.
Transfert ou appel d’offres
La continuité du service s’applique aux cas où, à la suite d’un appel d’offres menant à l’octroi d’un contrat, un second employeur commence à exploiter tout ou partie d’une entreprise fédérale ou, en raison d’un changement d’activité, une entreprise provinciale devient de compétence fédérale.
Commentaire
Les employeurs fédéraux sont confrontés à des changements législatifs majeurs, sans compter les autres dispositions des projets de loi d’exécution du budget qui entreront en vigueur plus tard. En plus de la modernisation du Code canadien du travail, un nouveau régime visant à prévenir les cas de harcèlement en milieu de travail entrera en vigueur en 2020 à la suite de l’adoption du projet de loi C-65 : voir l’article Federal Employers: Prepare for a Wave of Change in Workplace Harassment Obligations (en anglais seulement). À n’en pas douter, la seule constante pour les employeurs sous réglementation fédérale, c’est le changement.