La Cour suprême du Canada vient confirmer la décision de la Cour d'appel du Québec en faveur des autorités fiscales québécoises relativement à l'affaire 1068754 Alberta Ltd. c. Agence du revenu du Québec, dont nous avons discuté sur ce site l'an dernier.
Dans le cadre d'une vérification visant la fiducie albertaine DGGMC Bitton Trust (ci-après « Fiducie »), l'Agence du revenu du Québec (ci-après « ARQ »), pour déterminer si la Fiducie résidait au Québec et devait donc payer des impôts au Québec, a imposé à une succursale de Calgary de la Banque Nationale du Canada (ci-après « BNC ») l'obligation de produire divers documents bancaires concernant cette Fiducie en vertu de l'article 39 de la Loi sur l'administration fiscale du Québec. La demande péremptoire de renseignements et de documents a été envoyée directement à la succursale plutôt qu'au siège social de la BNC au Québec afin de se conformer aux exigences du paragraphe 462(2) de Loi sur les banques, qui requiert que la demande soit adressée auprès de la succursale de tenue de compte.
Le débat se portait sur la question de savoir si l'ARQ était contrainte par la Loi sur les banques d'envoyer la demande à la succursale de Calgary et si, en agissant de la sorte, elle avait accompli un acte de portée extraterritoriale. La Cour supérieure du Québec avait rejeté la requête de 1068754 Alberta Ltd. sollicitant l'annulation de la demande péremptoire de l'ARQ et avait conclu que la demande péremptoire ne constituait pas une saisie. Ainsi, l'ARQ pouvait effectuer cette demande dans une autre province, soit l'Alberta. Par la suite, la Cour d'appel du Québec avait conclu, en faveur de l'ARQ, que la demande était bien une saisie puisqu'elle empiétait sur une attente au respect de la vie privée de la Fiducie, mais que l'ARQ n'avait pas outrepassé sa compétence territoriale en vertu de la Loi sur les banques.
Enfin, le juge Rowe de la Cour suprême, avec l'accord unanime des autres juges, conclut que la demande de l'ARQ imposée directement à la succursale de Calgary, était une saisie, mais ne constituait pas un acte extraterritorial. Le paragraphe 462(2) de Loi sur les banques ne traite pas la succursale comme une entité distincte de la BNC. Un facteur important pour la Cour suprême a été le fait que la BNC, qui est une personne morale, exerçait ses activités à l'intérieur du territoire du Québec. Ainsi, la BNC forme une seule et même entité et ses succursales ne sont pas considérées comme des personnalités juridiques distinctes pour l'application du paragraphe 462(2). Par contre, si une personne morale n'exerçait aucune activité au Québec, cette conclusion ne s'appliquerait pas avec certitude.