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Perspectives

Martel c. Kia Canada : Précisions sur l’application de la garantie légale de conformité (art. 40 à 42 LPC)

Après l’arrêt Fortin, la Cour d’appel rend une nouvelle décision de principe dans le cadre d’une action collective sur le fond. L’arrêt Martel c. Kia Canada inc. (2022 QCCA 1140) est significatif puisqu’il constitue le premier jugement de principe clarifiant le test applicable pour établir une violation de la garantie légale de conformité des articles 40 à 42 de la Loi sur la protection du consommateur (« LPC »).

L’action collective ayant été rejetée pour le tout, il s’agit d’une nouvelle illustration que la simple autorisation d’un recours n’a pas d’incidence sur le mérite de la cause.

Contexte du recours

Mme Martel reprochait à Kia d’imposer, chez les concessionnaires, un programme d’entretien non conforme et plus onéreux que celui prévu dans le manuel du propriétaire en indiquant que la fréquence recommandée était l’entretien « intense », qui était plus fréquent que le « normal » en raison du climat rigoureux du Canada.

Dans son arrêt, la Cour d’appel confirme le rejet de l’action collective et la teneur des représentations donnant ouverture à la garantie de conformité :

  • La garantie de conformité vise les représentations qui ont joué un rôle dans la décision du consommateur: La Cour d’appel confirme d’abord que la garantie légale de conformité aux articles 40 à 42 LPC comprend les représentations qui ont influencé le consommateur dans sa décision de contracter et que celles-ci font partie de l’« entente contractuelle1». Par conséquent, pour qu’une représentation ait influencé la décision du consommateur, il est nécessaire qu’il l’ait lue d’abord.
  • La non-conformité doit atteindre un certain degré : La Cour d’appel rappelle par ailleurs que le défaut de conformité doit être assez important pour justifier l’octroi du remède demandé. Ainsi, toute différence mineure ne donne pas ouverture au recours2.
  • La garantie légale de conformité exclut les représentations postérieures au contrat: La Cour d’appel confirme également que seules les représentations précontractuelles et contractuelles sont pertinentes pour déterminer la description du bien acquis pour la garantie de conformité. Les représentations faites postérieurement à la livraison du bien ne modifient pas l’obligation du fabricant. Bien qu’elles soient pertinentes afin d’établir si un bien est conforme ou non au contrat, elles ne peuvent étendre ou accroître les obligations du contrat3.
  • La garantie légale de conformité applique le test du consommateur crédule et inexpérimenté : La Cour d’appel précise que le test du consommateur crédule et inexpérimenté, de la Cour suprême dans l’arrêt Richard v. Time (2012 CSC 8) en matière de pratiques interdites (art. 219 et 228 LPC), s’applique également à la garantie de conformité (art. 40 à 42 LPC). Les représentations reprochées doivent donc être lues et analysées dans cette perspective.
  • Le concessionnaire est une entité distincte du fabricant automobile : Les concessionnaires sont des personnes morales distinctes de Kia. Ainsi, les représentations des concessionnaires relativement à l’entretien n’engagent pas la responsabilité de Kia sans une preuve selon laquelle elle obligeait, incitait ou tolérait, directement ou indirectement, lesdites représentations relatives à l’entretien et à la garantie.

En l’espèce, la Cour d’appel confirme que les dépliants postérieurs à la vente ne permettent pas de constater un quelconque défaut de conformité. L’action de Mme Martel contre Kia est rejetée dans son entièreté, avec les frais de justice.

Commentaire

Cette décision est significative en ce qu’elle précise que les conditions d’application de la garantie légale de conformité du Titre I de la LPC ne sont pas significativement différentes de celles du Titre II. Ainsi, sur la base d’un recours en vertu des articles 41 et 42 LPC :

  1. la représentation doit être lue sous l’angle du consommateur crédule et inexpérimenté;
  2. elle doit avoir influencé la prise de décision du consommateur (et doit donc avoir été lue);
  3. elle doit être importante.

Il s’agit par ailleurs d’une nouvelle illustration que, bien que le seuil soit relativement bas à l’étape de l’autorisation, le fardeau de preuve au fond demeure celui du demandeur; à défaut d’y satisfaire, la demande sera rejetée.


1 Martel c. Kia Canada inc., 2022 QCCA 1140, para. 101.
2 Martel c. Kia Canada inc., 2022 QCCA 1140, paras 73-75.
3 Martel c. Kia Canada inc., 2022 QCCA 1140, paras 57, 101.

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