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Perspectives

Importants changements concernant la TPS/TVH dans les opérations immobilières à compter de 2018

Les opérations immobilières et les activités connexes sont assujetties à des règles complexes en matière de TPS et de TVH, et l’Agence du revenu du Canada (l’ARC) applique ces règles pour surveiller de près les opérations afin d’augmenter les recettes fiscales perçues par l’État. Nous présentons ci-après les principaux développements de la jurisprudence sur la TPS/TVH susceptibles d’intéresser les professionnels qui se livrent à des opérations immobilières et à des activités connexes.

La constitution en coentreprise peut permettre de verser moins de TPS/TVH

La TPS/TVH payée sur les honoraires de gestion immobilière est généralement une dépense irrécouvrable pour les propriétaires résidentiels et les autres fournisseurs de services exonérés de TPS/TVH (hôpitaux, universités, organismes de bienfaisance, etc.). Dans l’affaire Medallion, les propriétaires et le gestionnaire immobilier avaient évité de payer un montant de TPS/TVH irrécouvrable sur leurs services en structurant leurs rapports professionnels sous forme de coentreprise1.

Selon le jugement Medallion, pour pouvoir être considéré comme une coentreprise et non comme un fournisseur de services taxables, le gestionnaire immobilier doit répondre aux critères essentiels permettant de conclure à l’existence d’une coentreprise. Un de ces critères, qui a été au cœur du différend, concernait l’« objet » de la coentreprise. La Cour a notamment conclu que l’objet de la coentreprise était la location d’immeubles résidentiels et que, même s’il ne détenait pas de droit de propriété sur les immeubles et qu’il n’avait pas le droit d’en tirer profit, le gestionnaire immobilier avait le droit contractuel de louer l’immeuble résidentiel en son nom personnel. Par conséquent, comme le gestionnaire immobilier avait un intérêt de propriété dans les immeubles de la coentreprise, ce critère était rempli et les services fournis aux propriétaires par le gestionnaire immobilier n’étaient pas assujettis à la TPS/TVH2.

Les créanciers garantis ont la priorité sur l’ARC lorsque le failli doit de la TPS/TVH

L’arrêt Callidus Capital Corporation c. HMQ (CSC) précise qu’en cas de faillite de l’emprunteur, le créancier garanti n’est pas assujetti à la priorité absolue de la fiducie présumée de l’ARC sur les biens de l’emprunteur3. L’arrêt Callidus confirme que la faillite rend inopérante la fiducie présumée de l’ARC, qui est alors considérée comme un créancier non garanti pour ce qui concerne les sommes de TPS/TVH non versées. Consultez notre bulletin de novembre 2018 pour un résumé de cette décision.

Les sociétés en commandite devront peut-être tenir compte des règles relatives aux sociétés en commandite de placement

Les règles relatives aux « sociétés en commandite de placement » ont été officiellement adoptées par avis de motion de voies et moyens le 25 octobre 2018. Les sociétés en commandite de placement sont assujetties aux règles extrêmement complexes qui régissent les institutions financières désignées particulières (les IFDP) et qui peuvent donner lieu à un montant de TPS/TVH irrécouvrable si un des associés de la société en commandite de placement fournit à celle-ci des « services de gestion ou d’administration ». Si le fonds de la société en commandite est structuré de façon à ce que le commandité joue un rôle actif dans la gestion du fonds, il peut être utile de tenir compte de l’application de ces règles.

 

Il y a lieu de signaler que la société en commandite de placement est généralement définie comme une société en commandite à l’égard de laquelle l’un des énoncés suivants se vérifie : a) la société en commandite est présentée comme un fonds spéculatif, une société en commandite de placement, un fonds commun de placement, un fonds de capital-investissement, un fonds de capital-risque ou un autre mécanisme de placement collectif similaire ou fait partie d’un mécanisme ou d’une structure qui est ainsi présenté; b) la valeur totale des participations dans la société en commandite détenues par des « institutions financières désignées » (par exemple, une banque, un assureur ou un plan d’investissement) correspond à 50 % ou plus de la valeur totale des participations dans la société en commandite. Consultez notre bulletin de septembre 2017 pour en savoir davantage.

Remboursements de TPS/TVH pour habitations neuves lorsque des membres sans lien de parenté « cosignent » la convention de vente

L’arrêt Cheema c La Reine4 est une décision importante en ce qui concerne les conditions d’admissibilité de l’acheteur à recevoir un remboursement pour habitations neuves lorsque des personnes sans lien de parenté signent la convention d’achat et de vente, habituellement pour faciliter le financement hypothécaire. La Cour d’appel fédérale a jugé qu’il est nécessaire que chaque signataire du contrat de vente ait eu l’intention d’acquérir l’immeuble en vue de s’en servir comme résidence habituelle. La Cour d’appel fédérale a rejeté l’argument selon lequel l’ami de l’acheteur, M. Akbari, était un simple fiduciaire ou un mandataire de M. Cheema. Dans une rare décision partagée, le juge Stratas a déclaré au nom des juges majoritaires que les articles 133 et 254 de la Loi sur la taxe d’accise ne pouvaient pas être interprétés de manière à s’appliquer à une relation de mandataire ou de simple fiduciaire. Le juge Webb, dissident, n’était pas d’accord pour dire que la loi ne s’appliquait pas à une relation de mandataire ou de simple fiduciaire. En avril 2018, M. Cheema a saisi la Cour suprême du Canada d’une demande d’autorisation d’en appeler.


1 Medallion Corp. c. R, 2018 CCI 157 (Cour canadienne de l’impôt [procédure générale]).

2 Ibid, par. 27. Exonération de la TPS/TVH.

3 Callidus CapitalCorporation c. Canada, 2018 CSC 47 (Cour suprême du Canada).

4 Cheema c R, 2018 CAF 45 (Cour d’appel fédérale).

  • Par : Braek Urquhart