En 2019, le secteur des véhicules autonomes (VA) a connu d’importantes avancées technologiques et réglementaires qui ont transformé la promesse de déploiement de véhicules entièrement autonomes. Dans ce contexte d’effervescence du secteur, nous pensons que les discussions entourant les VA basculeront du grandiose au microscopique en 2020. Voici les grands enjeux juridiques liés aux VA qui marqueront l’année 2020 :
Industrie : des échéanciers révisés
Au milieu des années 2010, bon nombre de constructeurs automobiles et de sociétés technologiques s’attendaient à ce que 2020 soit l’année du déploiement à grande échelle des VA et de la révolution de l’industrie automobile. Ce sera plutôt celle où l’industrie et le gouvernement se heurteront à la complexité technologique, opérationnelle, industrielle et réglementaire de la mise en service des VA.
En 2020, nous nous attendons à un prolongement constant des délais prévus pour le déploiement à grande échelle des VA présentant un niveau d’automatisation élevé (niveaux 4 et 5). Parallèlement, les acteurs des secteurs technologiques et automobiles intensifieront sans doute leurs efforts pour commercialiser et déployer des technologies de VA à faible degré d’automatisation comme systèmes d’aide à la conduite.
Infrastructures : la 5G
Comme nous l’avons mentionné dans notre numéro d’octobre 2019, l’arrivée de la 5G devrait avoir une incidence importante sur les technologies et la viabilité du déploiement à grande échelle des VA. Les débits, les investissements privés et la polyvalence de la 5G ont convaincu beaucoup de gens qu’il s’agit de la technologie de communication la plus propice à la poursuite du développement des VA.
La 5G sera lancée cette année aux États-Unis, dans l’Union européenne, au Japon, en Chine et en Corée du Sud , ce qui rendra ces marchés de plus en plus attrayants pour les essais, le développement et le déploiement des VA. Ces pays sont des chefs de file du domaine, et le gouvernement et le secteur voudront sans doute miser sur le développement complémentaire des industries et des infrastructures de la 5G et des VA.
Au-delà de la 5G, les VA auront des répercussions beaucoup plus vastes et profondes sur la planification des infrastructures, car de grands pans du système routier devront être repensés en fonction de cette nouvelle technologie.
Au Canada, les différents ordres de gouvernement (principalement les municipalités et les provinces) devront commencer à intégrer les besoins relatifs aux VA dans leurs choix et leur planification en matière d’infrastructures. Il faut donc s’attendre à des discussions portant sur d’éventuels changements à l’aménagement et à l’entretien de la voirie, la planification du transport collectif, la gestion des bordures en raison de la diminution du stationnement sur rue, de nouvelles formes de pôles de mobilité privés-publics régionaux et la réalisation d’importants investissements dans les systèmes centralisés de gestion du trafic.
Contexte réglementaire et politique : les communications C-V2X et la réglementation des VA
En décembre 2019, la Federal Communications Commission (FCC) a adopté un avis de projet de réglementation qui proposait de réserver la tranche supérieure de 20 MHz du spectre de 5,9 GHz aux systèmes de transport intelligent utilisant la communication cellulaire véhicule à tout (« C-V2X »).
Ce projet de réglementation, que nous suivrons de près en 2020, a été applaudi par les tenants de la 5G et de la C-V2X aux États-Unis. Nous nous attendons à un élan d’enthousiasme de la part des partisans de la C-V2X chez nos voisins du sud et à de nouvelles discussions réglementaires concernant la gestion des données et la protection de la vie privée. Comme il restera peu de fréquences disponibles dans le spectre de 5,9 GHz une fois le règlement de la FCC en vigueur, la concurrence technologique entre la communication dédiée à courte distance (« CDCD ») et la C-V2X dans le domaine des véhicules intelligents risque de s’intensifier en 2020.
Les règlements et les essais de VA au Canada se concentrent dans les quatre provinces les plus peuplées et les plus développées (soit l’Ontario, le Québec, la Colombie-Britannique et l’Alberta). En 2020, nous pensons que d’autres provinces – fort probablement sous l’impulsion des grands centres – se lanceront dans l’aventure des VA et tenteront de se positionner pour bénéficier des retombées économiques de ce secteur.
Nous nous attendons à voir plus de villes canadiennes s’engager dans la mise à l’essai, le déploiement limité et le développement de VA. Des VA partageront notamment la route avec des véhicules traditionnels à Toronto, dans le cadre des essais de la navette automatisée de Rouge Hill menés par la Ville de Toronto, la Toronto Transit Commission et Metrolinx, ainsi qu’à Hamilton, dans le cadre du banc d’essai pour véhicules connectés et autonomes mené par la Ville de Hamilton, le Centre for Integrated Transportation and Mobility et AVIN.
Il y a lieu de croire que les municipalités canadiennes seront plus nombreuses à participer au débat public sur l’établissement de cadres réglementaires et de gouvernance en matière de VA. Par exemple, la Ville de London, en Ontario, a lancé en janvier 2020 un processus de consultation publique afin de se préparer aux bouleversements associés aux VA.
De même, la Ville de Toronto a établi la norme municipale de consultation et de préparation pour la province et le pays en lançant en octobre 2019 son plan tactique pour les véhicules automatisés, avec l’objectif ambitieux d’être prête pour l’arrivée des VA d’ici 2022. Nous suivrons de près les politiques, protocoles et stratégies de consultation publique élaborés par cette administration, car il y a fort à parier qu’ils influenceront ou définiront l’approche d’autres municipalités au Canada et dans le monde. Si la Ville gagne son pari, Toronto pourrait devenir le chef de file mondial des VA, d’autant plus que l’Ontario possède des atouts uniques en la matière.
Il y a beaucoup de raisons d’être enthousiastes dans le secteur des VA, puisque le cadre réglementaire et stratégique est en train de prendre forme au Canada et à l’étranger.